Le matin, en venant bosser, je tombe parfois sur “Histoires criminelles”, une chronique de France-Info qui relate de grandes affaires criminelles du siècle dernier.
Aujourd’hui, l’émission était consacrée à Jacques Faidherbe, qui de l’âge de 12 ans jusqu’à aujourd’hui, a passé toute sa vie derrière les barreaux : maisons de correction puis la prison pour finir son existence en hôpital psychiatrique.
Cet épisode m’a rappelé la douloureuse naïveté que je pouvais avoir vers l’âge où cette personne a basculé de l’autre côté du mur.
C’était le début des années 80 et tout ce que je voyais n’était que source d’angoisse sur mon avenir. J’affrontais l’inexorable montée du chômage en France : 1 puis 2 puis 3 millions. Il était franchement difficile d’imaginer un quelconque retournement de situation avec un retour rêvé du plein emploi. On était encore en plein guerre Froide et ça s’excitait du côté de la Pologne, de l’Afghanistan. L’Iran tout neuf dans son habit de république islamiste se foutait sur la gueule avec l’Irak. Du côté des Etats-Unis, on parlait d’armer le ciel de missiles anti-anti-anti missiles.
J’avais en plus eu le malheur de voir le film Soleil vert, Film d’anticipation qui décrivait l’état de la planète en 2022 : plus de faune, ni de flore, plus de boulot (on voit les gens s’entasser dans les couloirs d’immeuble). La seule nourriture se révèle être fabriquée à partir des cadavres humains. C’était la plein période des film apocalyptiques ou post nucléaire (l’âge de cristal et consorts).
Tout ça pour dire que je ne me voyais aucun avenir radieux en ce bas monde. Aussi connement que cela puisse paraître, la seule échappatoire que je voyais à ce néant était la Prison. Voici un lieu où je pourrais continuer à lire indéfiniment (ce qui me paraissait le seul but louable d’une existence) sans me soucier du lendemain. Bien sûr, cette solution n’était pas des plus réjouissantes mais elle paraissait moins grise que le manque de toit ou de nourriture. Autant vous dire qu’à cet âge là, la réalité de l’univers carcéral était des plus flous pour moi.
Et maintenant encore, alors que la radio continue à écouler son flot de mauvaises nouvelles, je repense à cette réflexion d’enfants avec beaucoup de nostalgie et de frissons