Ceci est une histoire presque vraie:
13h56……PARIS….Bâtiment Est du siège international de Leroy Merlin….
Le temps est gris et maussade. Le vent précipite avec furie les quelques ondées passantes avec fracas sur les murs gris. Dans le Bureau 218, Bernard Meunier se morfond. Il se sent inutile. Il est en train de remettre en cause tout son travail accompli depuis bientôt 23 ans dans l’équipe Conseil de Leroy-Merlin, le groupe bien connu de bricolage.
Pourtant Bernard n’est pas un débutant. Il a déjà connu ces moments de doutes et d’erreurs qui traversent la carrière professionnelle d’un homme : quand il avait conseillé en 1983 une mèche de 8 avec une cheville de 10 pour accrocher un tableau par exemple. Combien de fois s’est-il réveillé la nuit quand le parquet flottant avait commencé à se démocratiser…
Malgré tout, il avait tenu tête face à l’adversité et s’était forgé une solide réputation dans la maison. Il n’avait jamais renié ses idéaux de jeunesse, pensant que toute information était bonne à transmettre même si l’utilité première n’était pas manifeste. Il sentait bien pourtant que cette manière de faire ne cadrait pas avec la politique actuelle de sa société ; seul comptait désormais la recherche du profit au moindre coût.
cette attitude jusqu’au-boutiste avait fini par envenimer les rapports avec ses collègues qui ne comprenaient plus son entêtement. On l’évitait à la machine à café, les têtes se baissaient quand il passait dans les couloirs. Las de son acharnement, la direction l’avait déplacé dans un bureau isolé du reste de son équipe. On entendait ici et là des rumeurs quant à sa possible éviction s’il continuait à jouer l’électron libre.
Bernard Meunier se morfondait mais il s’accrochait encore à ses rêves, à l’utilité de ce qu’il avait accompli pour la postérité. Pour l’instant, les faits étaient contre lui mais il n’imaginait pas un seul instant qu’un jour il en serait autrement. En attendant, c’était les autres qu’on voyaient au tableau d’honneur dans le couloir arborant avec fierté leur chiffre en rouge gras.
14h00 : le mail quotidien des statistiques vient d’être envoyé par la direction. Tremblant, Bernard double clique sur la pièce jointe, machinalement mais sans convictions. Le temps que le pdf s’ouvre, le corps de Bernard se déchire entre espoir et lassitude.
Le document s’affiche enfin. Bernard le parcourt des yeux une fois, deux fois, trois fois, mille fois. Il aimerait se pincer comme dans les dessins animés pour se persuader qu’il ne se trompe pas. Il craint la sale blague perverse de collègues médisants. Il appelle illico Monique à la compta qui a la charge de la diffusion du précieux document. Elle lui confirme la véracité de celui ci . Il a confiance en Monique, elle qui lui a toujours souri amicalement lors des réunions hebdomadaires de reporting.
Fébrilement, il imprime la page, l’arrache de l’imprimante avant qu’elle ne soit complètement sortie et sort du bureau. Il traverse le long couloir qui le sépare du reste de l’équipe et franchit le perron. Il s’arrête, triomphant, le sourire au lèvres et savoure l’instant. Il attend. Il attend que ses “collègues” interloqués le regardent tous, lui qui les surplombent de sa satisfaction resplendissante.
Et lentement, hissant vers le firmament la preuve de son talent, Bernard lance à la cantonade un cri vengeur et Triomphal :
“je vous l’avais bien dit que ça intéresserait quelqu’un un jour !!!! Ah on fait moins les malins avec ses parquets et ses lambris!!!!“
Puis tournant le dos à l’assemblée médusée, il repart vers son bureau sans s’arrêter….
Oui tout ça pour dire qu’entre midi et deux, je suis allé à Leroy merlin et j’ai pris la Fiche conseil “Je pose une Rosace en toute simplicité” en me disant que personne ne doit la prendre celle là…