J’ai appris comme tout le monde hier la mort de Jean Giraud, alias Gir, alias Moebius.
C’est tout d’abord un énorme choc car je n’étais pas au courant de son cancer et je n’avais pas de raison de douter du caractère immortel des auteurs vivants qu’on chérit.
En effet, Moebius/Gir restera sans aucun doute comme la plus grande source d’influence qui a conditionné ma vie, directement ou indirectement.
C’est tout d’abord en terme de dessin que j’ai été le plus inspiré. Comme avait déclaré une personne dont le nom m’échappe : “Moebius nous fait croire que tout le monde est capable de dessiner alors que c’est faux”. Son trait, fouillé au départ s’est épuré jusqu’à une ligne claire faussement simple. C’est aussi un formidable illustrateur et coloriste.
C’est par Blueberry que j’ai découvert son oeuvre, comme beaucoup. Planqué dans la collection familiale, j’ai d’abord survolé le dessin plus que les histoires. Et en vieillissant leur relecture a été une constante découverte : Chihuhua pearl, Angel Face, la mine de l’allemand perdu, autant d’albums magistraux dans l’histoire de la BD
Je suis venu à Moebius par l’Incal aussi comme beaucoup, lors d’un séjour chez ma tante. J’ai ensuite religieusement acheté la série, puis les autres (les Jardins d’Edena, les compilations de la période Metal Hurlant). J’ai ensuite été plus critique car certaines histoires m’intéressaient moins (la folle du sacré coeur) ou me semblaient plus de l’ordre de la collection sans intérêt.
Quand je dessine (parfois), on retrouvera inévitablement du Moebius par les sujets abordés ou la technique (les jeux d’ombres, les remplissages à coup de traits savamment appuyés ou reportés à l’infini).
Comme je l’ai dit, Giraud est un homme d’influence : c’est grâce à lui que j’ai découvert Jodorowsky, Castaneda et une foultitude d’auteurs de science-fiction.
Influent, Moebius était aussi très influençable, parfois dans des directions discutables comme l’instinctothérapie de Burger. Certaines parties de son oeuvre était aussi très hermétique du fait qu’elle s’appuyait beaucoup sur ses rêves et son interprétation.
Mais bon sang, j’ai hâte maintenant de relire le garage hermétique, le bandard fou, le Chat et autres ouvrages sans commune mesure
J’ai eu le plaisir de l’approcher à Angoulême, lors d’une dédicace. Je n’avais rien dit, écrasé par la foule alentour se pressant autour et ma timidité manifeste devant l’Auteur. Pourtant je criais en moi le désir de lui signifier tout le bonheur que sa lecture m’avait apportée.
Et ce Week-end, je me sens un peu orphelin, comme si on avait amputé mon imaginaire.
Le site officiel (Moebius.fr) n’est pas très à jour. Je vous conseille de jeter plutôt un oeil à un site plus fourni : http://manocorto.free.fr